Transsibérienne en solitaire : ma nuit la plus longue…

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…Je fais le plein de gasoil, je retire de l’argent car sur la route pas moyen de payer par carte, je grignote des biscuits mongoles, et je prends la route…Aller, cette fois-ci c’est parti, je ne pourrai pas reculer…

A partir de ce moment-là, je ne sais plus trop où j’en suis dans les dates, mon cerveau s’est déconnecté de la réalité, et je ne fais qu’une chose : rouler, rouler et rouler.

Je suis un peu inquiet par mes freins arrières que j’ai bricolés, donc mon premier objectif est d’atteindre la ville de Krasnoyarsk, enfin c’est plus psychologique qu’autre chose, car de toute façon lorsque je serai dans cette ville, la concession Land Rover sera fermée car c’est le weekend…mais bon…

J’arrête pas de refaire les comptes dans ma tête : 7000km pour quitter la Russie, si je fais 400km par jour ça me fait plus de 17 jours, et encore si je roule en non-stop, puis une fois en Europe, il faudra que je me repose un peu avant de reprendre la route pour les 3000km restants…bref, je risque de fêter mon anniversaire seul sur la route…et la perspective de faire 1 mois de route seul m’effraye un peu, pourtant, j’aime rouler, je suis un bouffeur de bitume. Et puis quelle route prendre ? Est-ce que je passe pas l’Ukraine ? Les français que j’ai croisés en Mongolie ont eu pas mal de soucis là-bas avec les autorités, les douanes et les locaux…et eux, ils étaient à 2 voitures donc 4 personnes…l’autre solution, c’est remonter jusqu’en Latvia (je suis désolé, mais je ne me rappelle jamais du nom en français de ce pays), mais ça me fait faire un gros détour, car entre l’Ukraine et Latvia il y a la Biélo-Russie où il faut un visa que je n’ai pas…Dans tous les cas, la route s’annonce longue…

La route est longue et monotone. La radio ne passe pas ici, et je n’ai pas de CDs. Le plus contraignant est de n’avoir personne à qui parler, enfin il y a bien Wok-e, mais il répond peu…Du coup, pour passer le temps, je fais un vieux truc que j’aime bien faire : compter…mine de rien, je dépasse les 6000 en comptant, quasi une journée de route, voilà comment tuer le temps. Je roule non-stop, je ne m’arrête pas pour manger car je ne mange pas, je bois (de l’eau) toute la journée, et le soir, lorsque le soleil est quasi couché, je trouve un coin tranquille isolé de la route et je dors. Souvent, je me mets des petits défis : il faut que j’atteigne les 2 prochaines actions du GPS…et 600km plus tard (une bonne dizaine d’heures quoi), j’atteinds la première action, mais la prochaine est aussi à 600km…démoralisant, vraiment. Mais de fil en aiguille, mine de rien, je me fais 1000km par jour, je roule plus de 17h ! J’ai de la chance, comme je vais vers l’ouest, le décalage horaire est en ma faveur, je gagne 1h chaque jour, 1h où j’avance un peu plus, 60km mais c’est déjà ça. Avant de m’arrêter le soir, j’essaye de trouver de l’essence, pour ne pas m’arrêter en journée.

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Un jour, alors que je roulais tranquillement, une voiture verte me dépasse, reste à ma hauteur un moment, finit son dépassement, et brusquement freine devant moi, warning allumés, m’obligeant presque à m’arrêter. Il n’y a pas de voiture en face, je la dépasse de nouveau, derrière moi une autre voiture me colle et fait comme moi, tout en faisant des appels de phares et en clignotant pour me faire signe de m’arrêter. Je vois sa plaque d’immatriculation : une plaque européenne. Peut-être il veut qu’on fasse route ensemble ? Si je m’arrêtais pour lui parler ? Et puis la voiture verte me redépasse, et fait comme précédemment, les passagers du véhicule me font signe de m’arrêter (dont un gamin) : je comprends la manoeuvre, on veut me faire arrêter mais pas pour discuter…des routiers rencontrés aux stations services m’ont dit de faire attention à ça (d’après ce que j’ai pu comprendre, car on ne parle pas la même langue), et là, je me sens d’un coup très seul…les 2 voitures m’encadrent de très près, mais peu importe, j’ai rien à perdre, mon Teddy est bien plus gros, s’il faut, je cabosse et je pousse du pare-choc, et mes poursuivants l’ont compris…durant une demi-heure, c’est une course-poursuite avec une seule phobie : ne pas tomber en panne, car depuis quelques temps, j’entends des bruits bizarres dans la chaîne de transmission…je ne stresse pas spécialement, j’ai pas vraiment le temps en fait, j’essaye juste d’esquiver, car je ne peux pas les semer sur une aussi grande ligne droite et avec une vitesse de pointe à 80kmh…Et puis environ 30min plus tard, ils se décident à me laisser partir, on a du dépasser leur « zone de travail ». Quelques minutes plus tard, je comprends pourquoi : on arrive à proximité d’un poste de police, donc forcément, trop risqué pour eux. Je suis content de trouver ce poste, je leur explique ce qui vient de se passer, mais ils ne parlent pas anglais…bon, je continue…

Un autre jour, je croise un van aménagé, des chinois, je les suis une bonne partie de la journée, mais je pousse un peu Teddy pour les suivre, 80kmh tout le temps…d’hab, je peux rouler à plus de 100kmh, mais là, clairement, il y a un souci dans ma transmission, je perds de la puissance et je ne peux pas rouler plus vite, et rouler à 80kmh force sur la mécanique…A l’approche d’une ville, on finit par se perdre, je continue ma route seul.

Et puis LE jour…un jour qui commençait mal de toute façon : mon tel portable ne passait pas, ça aurait du me mettre la puce à l’oreille que la journée allait être pourrie…il fait moche aujourd’hui, comme les autres jours en fait, il fait froid et il pleut la plupart du temps. La journée roulage se passe comme d’hab, j’envoie un signal de balise tous les 250km pour rassurer les proches, je me permets un arrêt le midi pour acheter du pain pour manger un truc (quasi mon seul repas en fait), la journée se passe, toujours aussi solitaire et morose. Mais aujourd’hui, nouveauté, je me fais surprendre par la soleil ! D’habitude, je gagne 1h par jour, mais aujourd’hui, j’en gagne 2 ! Du coup, je roule bien plus longtemps que mon heure habituelle, et le soleil se couche, d’un coup, sans que j’ai eu le temps de trouver un bivouac. Dans la pénombre, je recherche donc où me garer. Je teste quelques chemins, mais comme il a plut, je n’ose pas m’aventurer trop loin, car c’est boueux, il faudrait pas que je me tank…Et puis après plus d’une heure de recherche, je finis par m’engager dans un chemin, il fait quasi noir, et là…Teddy part en glisse, je ne maitrise plus rien, je glisse sur plusieurs mètres car c’est une descente et me voici totalement tanké ! Je sors, et je constate : ponts avant et arrière posés, les 4 roues en l’air. Ok, c’est chaud, très chaud, on est pire qu’en Mongolie là.

Je fais le bilan : il est environ 21h, il fait noir, il fait froid, je suis tanké bien proprement et je suis tout seul. En Mongolie, même si Hyon et Pauline sont toutes petites, au moins, on était 3. Soyons positif : il ne pleut pas =) Allez, zouh, en caleçon (parce que des fringues mouillés et boueux c’est lourd) et on commence le chantier…sauf que, je ne mange pas depuis plusieurs jours, alors lever le cric qui fait 20kg me demande un effort énorme, les plaques de désembourbage font 10kg chacune…Je lève chaque roue du Def, je mets les plaques ou du bois, je repose, quand les 4 roues ont été faites, je recule de moins d’un mètre, le Def se replante, et on recommence, plus de 10 fois, j’ai pas compté…et au bout d’environ 2h, j’ai réussi, le Def est déplanté et sur un sol stable ! Ourah ! Ok, je suis crade, ok, je suis physiquement KO, mais là, je suis pas peu fier : j’ai pu sortir le Gros du plus gros tankage qu’on n’ait jamais eu ! Wok-e, tu auras intérêt à en témoigner, tu es mon seul témoin…

Il fait froid, je remonte vite sur le toit de Teddy pour remettre les plaques de désembourbage, je commence à ressentir violemment le froid, mes pieds gèlent et j’ai du mal à les bouger, mais il faut que je range tout avant de reprendre la route. Une fois que tout est bon, en voiture, chauffage à fond, je me rhabillerai plus tard…il se fait tard, tant pis, ce soir je dormirai sur un parking de routier, ils sont payants mais sécurisé, je n’ai plus la force de rouler trop longtemps pour chercher un coin tranquille…j’espère trouver un parking rapidement…

Je roule depuis seulement 10 min que j’entends des bruits de craquement bizarre sous Teddy, et un grand fracas, et là d’un coup, je n’avance plus, et le moteur s’emballe : et merde, je crois qu’il y a un problème…Je descends, je prends ma lampe et je me penche sous la voiture : cardan avant cassé…bon, pas de souci, je vais passer uniquement sur le pont arrière (propulsion) pour avancer un peu…sauf que ma boite de transfert me permettant de faire ça a sauté et n’enclenche plus rien !

Faisons le bilan : il est 23h passé, mon GPS me dit que je suis à 800km de Moscou et 600km de la ville la plus proche, je suis sur une route peu fréquentée, ma voiture est en panne et au milieu de la route en plus, je ne peux donc même pas dormir dedans tranquillement en attendant qu’il fasse jour. Dans ces cas-là, on a 2 solutions : on peut pleurer ou se relever les manches. Pour ma part, j’étais déjà en caleçon, donc j’avais pas de manche, mais j’ai décidé de ne pas me laisser aller. Je sors ma caisse à outils et j’entreprends de démonter le bout de cardan qui reste en place et qui pendouille. Sauf qu’en fait, une fois sous la voiture, je me dis que c’est juste trop dangereux, car si une voiture arrive, c’est collision assurée avec moi en dessous. Du coup, solution bis : je sors la sangle de remorquage (qui n’en est pas une en fait, mais une corde souple pour sortir une voiture tankée…c’est une sangle souple donc), je l’accroche à l’avant de Teddy, et je me décide à arrêter une voiture qui va passer…un jour…

Le temps passe, je ne sais pas combien de temps, j’attends en caleçon (parce qu’avec tout ça, j’ai oublié de me rhabiller) sur mon bord de route avec une corde, et au bout de la corde mon gros Teddy qui fait 2,5 tonnes…Avec du recul, je me dis que je devais être drôle à voir…sauf que j’étais pas d’humeur pour rigoler. Bon d’un autre côté, je me disais que j’étais le seul responsable de ce qu’il m’arrivait, j’ai choisit de partir en voyage en 4×4 avec les inconvénients que ça comporte…et ce que je vis c’est rien par rapport à ce que vit Pauline en ce même moment. J’ai toujours été positif, ça va pas changer maintenant. J’entends la voix de ma mère qui me dit « de toute façon, tu t’en sors toujours »…bon, bah ça va être pareil cette fois-ci.

Ah tiens, une voiture, elle s’arrête ! Sauf que c’est une petite berline Lada, pas le genre de voiture qui pourra me tracter. Je me précipite vers la voiture, mais il en sort 3 jeunes russes qui m’ont l’air saoul, mais surtout, qui ont un ton menaçant envers moi…je m’arrête et eux se précipitent vers moi et m’encerclent. Ok, là ce coup-ci maman, je crois que je vais pas m’en sortir…

Je ne suis pas croyant, mais là, il se passe un truc de fou : l’histoire retiendra que sur cette route où personne ne passe depuis des heures, un petit camion passe, et freine juste après nous avoir dépassés et deux russes en sortent, foncent vers nous. Il s’en suit un échange en russe assez animé que je n’ai bien sûr pas compris, les 3 mecs bourrés regagnent leur Lada et filent…ouf…j’ai eu chaud…Enfin j’ai eu froid car je ne me suis toujours pas habillé, mais c’est pas passé loin. J’explique aux deux chauffeurs du petit camion mon problème, en anglais, et bien sûr, ils ne le parlent pas eux. Je leur explique qu’il faudrait me tracter jusqu’à Moscou (800km) et que je les payerai bien sûr. Mais Moscou c’est trop loin, ils m’amèneront à la vile la plus proche, 600km, d’où je pourrai trouver une autre personne qui m’amènera à Moscou. Ok, j’accepte, j’ai pas le choix, qu’importe le prix, je prends. Ils me demandent 5000 roubles, environ 125€, autrement dit rien quoi vu la distance…On accroche ma sangle à leur camion et on est parti…

J’étais hyper content d’avoir trouvé quelqu’un pour me tracter, mais ma joie fut de courte durée : la fatigue me rattrape d’un coup, il est environ 1h du mat, je n’ai pas mangé depuis plusieurs jours (car les jours précédents, je ne faisais que conduire pas d’autre effort, donc peu de besoin) et j’ai vraiment très envie de dormir…eux, ils sont deux, ils bossent, ils sont livreurs, donc ils ne s’arrêtent pas, si je les laisse, je ne sais pas si je trouverai quelqu’un pour me tracter…je chante, j’ouvre mes vitres pour avoir froid et me réveiller, je crie, je me pince, je me mords, je me brûle, tout pour rester éveillé. 5m, c’est court, ma sangle ne fait que 5m, je ne vois donc rien à part ce camion qui me tracte, et cette vue me berce, il slalome pour éviter les nids de poules, mais moi je ne peux rien faire, je suis balloté au bout de ma sangle, près à freiner s’il freine, à tourner au dernier moment quand les virages…si j’avais eu une barre de remorquage et pas une sangle !

Nous faisons de temps en temps un arrêt, pour qu’ils fassent de l’essence et surtout pour qu’on pisse, tous, car là, on est un peu tendu. J’en profite pour m’acheter une redbull à une station, on va voir si ça va me tenir éveillé assez longtemps. Mes chauffeurs m’expliquent qu’ils ne peuvent pas aller moins vite, car ils sont pas en avance, et en effet, quand je regarde mon compteur, on roule à 90kmh ce qui est énorme vue la situation et l’état de la route ! à 90kmh, à 5m derrière un camion, il faut avoir des réflexes et improviser un peu (beaucoup)…

Et puis une petite côte, le camion peine car je suis aussi lourd que lui, en haut de la côté, lui fait un écart à gauche pis gros virage à droite, ce qui a pour effet de ballotter mon gros Teddy sur la gauche de la route, et…un camion est là, face à moi, à quelques mètres. Par réflexe,  j’accélère, mais le moteur ne transmet pas la puissance aux roues vu que ma transmission est cassée, je ne peux pas freiner sinon je reste sur place et c’est le choc assuré avec le camion, mon volant est braqué à droite mais cette putain de sangle n’est pas en tension…ok, là, ça ne dépend plus de moi, je ferme les yeux, et je m’attends au choc frontal. J’entends un grand fracas, puis un grand claquement, tout tremble. Et puis j’ouvre les yeux, je suis encore là ! Je cherche le camion dans mon rétro, mais je ne le vois pas, car mon rétro gauche est rabattu : c’est donc ça le fracas que j’ai entendu, c’est mon rétro qui s’est replié car il a du tapé…ah oué, ça c’est joué à moins de 10cm alors…Devant moi, ils n’ont pas pour autant lâcher l’accélérateur, mais ai-je le choix ?

Cette scène c’est hélas repassée une bonne vingtaine de fois dans cette nuit…entre somnolence et euphorie, je ne comprends plus grand chose, le temps passe…le temps long, si long…je lutte contre la fatigue, j’attends impatiemment le jour, je me dis que la lumière du jour me réveillera ? Et puis le jour arrive enfin, je me sens soulagé même si la fatigue est là…mais ces rayons de soleil me réconfortent : j’ai au moins passé la nuit !

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Et puis, plus de 12h après m’être accroché au camion, j’arrive dans la ville promise. On me décroche, le camion part mais l’un des chauffeurs reste avec moi. Il m’aide à finir de démonter Teddy. Et puis au bout d’une heure, son ami revient avec le camion, ils discutent. Et puis, ils viennent vers moi et me disent que d’accord, ils vont me tracter jusqu’à Moscou, pour 5000 roubles de plus. Je ne discute même pas et j’accepte, je dois aller à Moscou et retourner au garage Rover Land, les mêmes qui ont changé la boite de vitesse.

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En route pour Moscou, mes chauffeurs font une pause, pour se reposer, mais moi, je suis trop nerveux pour m’endormir. On est en bord de route donc pas l’endroit le plus sûr, et j’ai surtout peur que mes chauffeurs m’abandonnent, alors je ne dors pas. Je fais le tour de Teddy, range, nettoie, je mange ce que je trouve à l’arrière car je suis à bout de force…Au bout d’un moment, je fais un peu de bruit pour les réveiller, car le temps passe et j’aimerai arriver au garage avant qu’il ferme, même s’il ferme tard vers 21h. Je leur explique et je leur donne l’adresse du garage.

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La route se poursuit et on arrive à Moscou, et bien sûr, on arrive dans les bouchons…je regarde mon GPS, et bizarrement, on ne va pas dans la direction du garage, au contraire, on va à l’autre bout…et dans les bouchons en plus, c’est galère d’être tracté, pour le coup, la sangle est trop longue : les voitures tentent de se faufiler entre mon remorqueur et moi !

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Et puis d’un coup, je comprends ce qu’il se passe : mes chauffeurs m’amènent à une concession Land Rover, comme Teddy est un Land Rover, et surtout, il m’amène dans la même concession où on est déjà passé à l’aller et où ils ne font pas de pièces pour Teddy qui est trop vieux ! Sur le parking, je leur remontre l’adresse de l’autre garage et là, ils comprennent l’erreur : ils pensaient que c’était l’adresse d’un hôtel où j’allais dormir…je leur montre la carte grise de Teddy pour leur montrer l’année de la première immatriculation et ils comprennent aussi : Teddy est trop vieux et cette concession ne pourra rien pour moi…Bon, ok, ils vont m’amener à l’autre garage, à 60km de là, mais pas de suite, trop de bouchons…Ils me demandent de les payer, je fais mine de pas comprendre, car si je paye maintenant, j’ai peur qu’ils partent me laissant là. A force d’insister, je ne peux plus me défiler, je les paye. Le plan pour eux c’est de dormir un peu, le temps que les bouchons passent et après ils m’amènent là-bas. Forcément que moi j’ai pas vraiment envie de dormir, au cas où…

Et puis l’un des deux part, je reste avec l’autre, on essaye de parler. Je lui raconte mon histoire, on se comprend en fait, avec quelques mots d’anglais qu’il comprend, quelques mots de russes que je comprends…on ne parle pas politique bien sûr, mais on se comprend un peu.

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Et puis son acolyte arrive, avec des sacs de courses remplis ! Il me demande si j’ai de quoi faire à manger, je dis oui, Teddy est tout équipé, et là, je comprends : en fait, ils voulaient que je les paye pour avoir des sous pour aller faire des courses et nous faire à manger pour nous 3 !

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Bière, poissons russes, poulets aux épices, ce repas est excellent, surtout que j’ai pas mangé depuis longtemps ! Avec cet événement, maintenant je leur fais totalement confiance, après le repas, je vais moi aussi me coucher pour me reposer. Notre sommeil sera interrompu par la rencontre d’un allemand qui vit en Russie, alors qu’en Autriche j’arrivais pas à parler allemand, là, avec lui j’y arrive et il se fait l’interprète entre mes chauffeurs et moi ! Après ce petite moment totalement improbable (parler allemand avec un russe à Moscou), on retourne se coucher, et vers les minuits, mes chauffeurs tapent aux carreaux de Teddy : en route, on part direction le garage, il n’y a plus de circulation. Evidemment, le garage est fermé à cette heure-ci, mais je m’en fous, au moins, je serai sur place pour demain.

Il y a 60km pour rejoindre le garage, et sur ces 60km, on s’est fait contrôler 3 fois par les flics ! Evidemment, un petit camion qui tracte un Defender sans plaque à l’avant (perdue en Mongolie) et une plaque française à l’arrière, c’est louche et les flics ne font que leur boulot, mais je suis fatigué, énervé, alors une fois, deux fois…et la troisième fois, le dernier flic veut me coller une prune car j’ai pas de plaque. Alors je m’énerve pour de vrai, je l’insulte copieusement, en français, ça sert à rien il comprend pas, mais ça fait du bien, ces quelques heures de tension se relâchent comme ça. Quand j’ai fini ma tirade, le flic me regarde, à l’air de réfléchir, ne dit rien durant un moment, et puis…nous dit de partir. Hein ? Je comprends pas ce qu’il se passe là…mais tant pis, je remonte en voiture et c’est reparti…bizarre…

On arrive enfin chez Rover Land, fermé bien sûr. Je descends, je vais voir le gardien il faut qu’il me laisse rentrer, je ne peux pas rester toute la nuit dehors, dans la rue. Je négocie, je m’énerve, et puis il accepte de me faire rentrer. De toute façon, il aurait pas voulu, je serai resté devant le portail bloquant l’arrivée des employés et clients demain ! Bien que le parking soit sécurisé, il me dit de m’enfermer dans ma voiture et de ne rien laisser d’apparent…rassurant, mais au moins, je m’en fous, j’y suis, c’est gagné ! Je ne dormirais pas cette nuit-là encore, mon corps trop nerveux tremble, je n’arrive pas à trouver le repos.

Le lendemain, je retrouve l’équipe de Rover Land, ils rigolent, mais à voir ma tête se ravisent. On fait le tour de la voiture : ok, pour la boite de transfert qu’on pense cassée, il va falloir 5 jours pour avoir la pièce. Mais 5 jours, pour moi c’est trop tard, je dois partir, quitter la Russie ! Ils vont faire leur maximum, quitte à aller chercher eux même la boite s’il le faut pour gagner du temps. Merci ! Rassuré, je les quitte, et je vais aller dans une auberge de jeunesse pour me reposer, je prends quelques affaires dans Teddy et je pars, direction le métro.

En chemin, dans le métro, alors que je prends ma correspondance, c’est le moment où mon corps décide de me lâcher : je ne sens plus mes jambes, je m’effondre au milieu de la foule. Les gens se précipitent vers moi, me parlent en russe, je ne comprends rien, et puis une jeune femme me parle anglais. Je la regarde, incapable de parler, mais elle a du comprendre que je la comprends, et donc elle me rassure, me relève, prend mes affaires et m’assoit non loin. Elle attend avec moi. Quand j’ai repris mes esprits et mon corps, je la remercie, et m’apprête à reprendre le métro pour finir mon voyage. Elle refuse, elle veut me payer un taxi, mais je sens que ça va mieux. Elle insiste, et comme je ne veux pas, elle décide de m’accompagner à mon auberge, et elle porte mes affaires ! Une fois arrivés, elle s’assure que tout va bien et elle part. Je n’ai même pas eu le réflexe de lui demander son mail ou son nom pour la remercier après. Mais quelque part à Moscou, je remercie cette jeune femme anonyme qui m’est venue en aide.

Bon, maintenant j’ai un toit, j’ai une douche, je vais pouvoir me doucher et me reposer car demain, Hyon arrive en avion pour me chercher ! Elle revient de Paris pour m’aider à finir cette longue route ! Ouf !

Pour les quelques courageux qui ont réussit à me lire jusqu’au bout, bravo =) Maintenant, vous savez tout, ou presque, de notre voyage…et des épreuves qu’on a pu traverser. Aujourd’hui, j’ai du mal à réaliser que j’ai pu faire tout ça, ça me parait loin, une autre vie…comme quoi, on peut être tout petit, mais pouvoir faire des choses qui nous dépassent…

15 thoughts on “Transsibérienne en solitaire : ma nuit la plus longue…

  1. Salut Hyon et Jmi,
    Waouuu juste émouvant ton récit de retour, tu n’étais pas seul, en tout cas moi j’ai eu l’impression d’être sur le siège passager mais si à des moments tu as du te sentir très seul.
    J’ai envie de dire que cela donne, vous avez eu les coui… de l’avoir fait.

    Je suis en Angleterre en ce moment mais comparer à vous ce n’est pas de l’aventure, c’est quoi 5 heures de voyages Paris- Bordeaux ….

    Bravo

    A Bientôt
    Raph

    1. Bah, c’est pas vraiment une histoire de courage ou autre, c’est juste qu’on avait envie de voyager et qu’on a encore envie de voyager…

      Les galères, inconvénients et autres pannes font aussi parties de l’aventure, même si c’est pas toujours drôle, il faut les accepter et le prendre comme un nouveau challenge à relever à chaque fois…et puis la difficulté suivante nous fait oublier la précédente qui avait l’air facile en comparaison =)

      A chacun son aventure, moi il y a quelques années, le Maroc en 4L ça me paraissait un truc de fou, maintenant, ça ressemble à une promenade de santé =)

      N’ayez pas peur, partez, prenez des risques ! Petit à petit, faites votre expérience, et dites-vous que y a des gens qui vivent bien pires que vous mais qui eux ne l’ont pas choisi !

    1. Merci Michel !
      On se reverra très bientôt j’en suis certain, en France ou quelque part dans le monde au détour d’une piste 😉 (surtout que j’ai un bon GPS qui marche bien en plus, donc prendre des pistes ne me fait pas peur ! 😉 )

    1. On a vécu des choses différentes, mais je pensais en permanence à ce que tu traversais. Moi, j’ai « choisit » tout ça, toi non.
      Ne t’excuse pas, ne t’excuse SURTOUT pas, ce n’est pas ta faute, loin de là. Nous aurions vécu peut-être pire avec Hyon en continuant notre route comme prévu.
      Tu n’es responsable de rien, et je ne t’en veux pas du tout et pour rien…et j’ai été heureux d’être rentré à temps pour ton anniv et d’être là régulièrement à tes cotés à chaque étapes importantes (1ère perm, 1er WE…)
      Pis prépare toi pour la suite, on a des voyages à faire, des projets à concrétiser pour tourner cette page, clore ce chapitre !

  2. on en reparlera autre part….vs avez pas choisi ce qui m’est arrivée et les conséquences non plus ms oui ne comparons pas ce qui n’est pas comparable! je vx bien clore ce chapitre ms pas celui du voyage 🙂

    1. …t’inquiète, les voyages, ça ne fait que commencer…le monde est grand, on est petit, ça va juste mettre un peu de temps 😉

  3. HA-LLU-CI-NANT !!!

    J’avais dit a Céline que si elle n’avait pas été enceinte, je prenais un avion pour te rejoindre et faire le retour avec toi. Je n’ai jamais imaginé un instant que tu en aies autant bavé !!!

    J’aurais vraiment aimer pouvoir t’aider dans ce retour !

  4. Chapeau bas !
    Quelle experience, quel voyage!

    On passera par Bordeaux en remontant du Portugal fin Avril et honnetement ca nous plairait de vous payer un verre, de partager une sortie en Def, un bivouac ou…

    A+
    Ben

      1. Super! On programme un arret chez vous alors… Ce qu’on a vecu risque de vous paraitre un peu trop « facile » mais on prend le risque… 🙂

  5. Je ne te connais pas mais Scooby et Aurélie m’ont (un peu) parlé de toi.
    J’aime l’Aventure …….. mais je n’ai jamais vécu les miennes ailleurs que dans un confort douillet !
    Pourtant j’en ai rêvé plusieurs fois depuis ma jeunesse.
    BRAVO à toi pour ce retour mouvementé et ta résistance, et récit passionnant lu de bout en bout.
    Bear

    1. Ce retour a en effet été mouvementé…mais la plus grande leçon que j’en retire, c’est qu’avec un peu de volonté, on peut tout faire…même si on fait 1.62,5m seulement 🙂
      Mais j’espère vraiment que je n’aurai plus jamais à vivre quelque chose comme ça…

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